Ecotaxe : assez du stop-and-go, la mobilité a aussi besoin d’une loi de transition
La décision de la ministre de l’écologie et du ministre des transports de reporter sine die la mise en œuvre de la taxe poids lourds constitue une nouvelle et triste illustration du manque de vision qui caractérise depuis des années la politique des transports en France.Il est grand temps se concevoir une stratégie des transports adaptée aux besoins de la société et de sortir de l’amateurisme et des revirements quant à son financement.
Le gouvernement Sarkozy-Fillon avait fait voter le principe d’une taxe sur les poids lourds : les écologistes en avaient soutenu le principe car il avait l’avantage de faire contribuer les camions au financement des travaux liés à l’usure des routes. Ce mécanisme est vertueux puisque les camions usent beaucoup plus les routes que les voitures particulières. Ce mécanisme est plus vertueux que la fiscalité directe sur les entreprises puisqu’il met à contribution de la même façon les camions étrangers qui échappent sans cela à toute contribution au financement des infrastructures.
Il convient de rappeler que cette taxe poids lourds avait été négociée avec les syndicats de transport routier qui avaient obtenu des compensations importantes, avec une quasi suppression de la taxe à l’essieu et l’autorisation de passage aux 44 tonnes.
Malheureusement, la façon dont le gouvernement Fillon avait préparé sa mise en œuvre a fragilisé la taxe poids-lourds : la complexité du dispositif, son report au-delà de l’élection et le contrat Ecomouv’ établi pour sa perception, plus que contestable, ont nourri les oppositions.
En décrétant un moratoire sur l’application de la taxe, puis en imaginant un dispositif fait de bric et de broc (associant financement par les particuliers via la taxe diesel, péages routiers pour les poids-lourds sur un réseau rétréci par rapport au projet initial et recettes aléatoires), l’actuel gouvernement n’a pas su trouver les solutions d’un financement clair, juste et pérenne nécessaires.
On ne peut que regretter que le dispositif de financement qui subsiste désormais porte sur les seuls ménages, avec l’augmentation prévue de 2 centimes de la taxe sur le Diesel.
Même si le chapitre « transports » du projet loi de transition énergétique, actuellement en discussion, sort renforcé du travail parlementaire, il ne suffit pas à dessiner une politique globale de transports digne de la transition écologique.
C’est pourquoi les député-e-s écologistes en appellent à une remise à plat globale de la politique des transports en France, de ses priorités et de ses financements. Plus de trente ans après l’adoption de la loi d’orientation sur les transports intérieurs de 1982, la France a besoin d’un nouveau cadre législatif et budgétaire pour réorienter la politique des transports et sortir du tout-routier. Elle constituerait, après la loi sur la transition énergétique, un deuxième rendez-vous majeur de la majorité avec l’écologie et permettrait de sortir enfin de la logique du coup par coup.
En tout état de cause, la ministre ayant annoncé la mise en place d’un groupe de travail associant les transporteurs routiers et « tous les acteurs concernés » dès la semaine prochaine, les député-e-s écologistes demandent au gouvernement d’associer étroitement les parlementaires à cette initiative, et notamment celles et ceux qui sont les plus engagés sur l’indispensable transition écologique de nos modes de vie, de transports de marchandises et de déplacements, dans une vision d’aménagement du territoire et d’intérêt collectif.